Je m'ennuie et j'ai besoin d'écrire, je mets ça là quelques temps et je le virerai sans doute sous peu.
Ce poème d'Apollinaire fut publié dans le recueil "alcools", recueil probablement le plus célèbre du poète.
Ce poème fut dédié à Marie Laurencin si je ne m'abuse, laquelle fut, malgré ce que ses aquarelles laissent supposer, cataloguée longtemps parmi les cubistes (à vérifier).
Cette dédicace place d'emblée le poème dans un tête à tête avec la peinture, qui se confirme à travers une première lecture du poème, lequel semble nous décrire une scène qui regorge de termes liés à la peinture, plus précisément à la teinte :
"ombre", "s'exténue", "mire", "crépusculaire", "sans teinte", "constellé", "pâle", "blême".
Quatre occurences soulignent ici la pâleur de la scène décrite, et l'on est tenté de relier cette tonalité au titre du poème.
Armés de cette première piste de lecture, reprenons le poème vers à vers, autour de ce qui sera notre axe directeur : comment ce poème joue-t-il à se mesurer à l'art pictural, proposant l'ekphrasis (en gros, description de peinture en littérature) d'un ou plusieurs tableaux afin de les sublimer par le pouvoir des mots ? (naze, LOL, je pense le reprendre et l'affiner plus tard)
Le titre du poème renvoie apparemment à un moment précis de la journée, cet instant où la nuit succède au jour, où le lumière est parfois cataloguée un peu vite de blafarde, où l'on se situe dans un entre deux entre la lumière et la nuit.
Je considère, malgré la disposition du poème, les quatre premiers vers comme un quatrain, dans la mesure où la rime embrassée m'y autorise.
Ce premier quatrain présente arlequine, personnage de la commedia dell'arte, nue, face à un étang, en contemplation de son corps :
Nous reconnaissons d'emblée un paradoxe dans la scène décrite puisqu'Apollinaire nous présente un personnage que chaque spectateur devrait reconnaître d'emblée s'il la voyait monter sur scène, à son habit.
Or, ici, arlequine est nue.
Arlequine est un personnage qui n'existe pas dans la commedia dell'arte, mais colombine y est parfois représentée en amoureuse d'Arlequin, portant alors un vêtement qui se rapproche de celui, coloré, de son amant.
principales caractéristiques du personnage :
Dès les premiers vers, nous comprenons que la scène qui va se jouer se situera bien dans les marges de l'univers théâtral, dans un univers distordu, où les repères que nous avons concernant les personnages, seront bouleversés.
La scène est inquiétante, un peu étrange, puisque qu'arlequine, loin de la fête de village où son personnage se produit (peut-être après le spectacle, à l'heure où tombent les masques), est ici "frôlée par les ombres des morts". Le groupe adjectival qui décrit arlequine est placé au premier vers du poème afin bien évidemment d'être mis en évidence, et ce vers qui commence par une caresse, s'achève par l'évocation de la mort, sans plus d'explication. Cette idée de la mort est reprise à la rime, puisque le jour "s'exténue".
Le poète nous invite à une sorte de ballet dont le macabre n'est pas exclu, disons plutôt l'ambiguité, dans la mesure, où, nous le verrons, il est, à l'instar du crépuscule ardu à décrire sur le plan lumineux, difficile de définir l'ambiance créée dans ce poème.
Le poète ne donne aucune piste quant à la situation du personnage qu'il décrit, mais son attitude étrange n'est pas sans rappeler un tableau : le "Gilles" de Watteau, tableau ô combien célèbre, dont l'ambiguité dans l'attitude est souvent soulignée par les commentateurs. Dans ce tableau, Pierrot, les bras ballants, affiche une attitude génée, un brin souriante un brin mélancolique, difficile à définir et qui laisse le contemplateur face à un malaise indéterminé et une difficulté de trancher quant au sens à apporter à la scène. Bien entendu, cette scène, dans le tableau de Watteau, possède une lumière qui personnellement me rappelle celle du crépuscule :
notons enfin que cette première strophe, confirmée dans sa référence par la présence d'un Arlequin blanc comme Pierrot dans les vers suivants, rappelle un célèbre poème de Verlaine, publié en 1866, dans "poèmes Saturniens". Mais ici il semble que l'ambiance soit tout autre, car hormis la femme perverse qui mène la sarabande, Verlaine décrit une scène bien plus gaie, du moins pendant la première partie du poème :
" Crépuscule "
Frôlée par les ombres des morts
Sur l'herbe où le jour s'exténue
L'arlequine s'est mise nue
Et dans l'étang mire son corps
Un charlatan crépusculaire
Vante les tours que l'on va faire
Le ciel sans teinte est constellé
D'astres pâles comme du lait
Sur les tréteaux l'arlequin blême
Salue d'abord les spectateurs
Des sorciers venus de Bohême
Quelques fées et les enchanteurs
Ayant décroché une étoile
Il la manie à bras tendu
Tandis que des pieds un pendu
Sonne en mesure les cymbales
L'aveugle berce un bel enfant
La biche passe avec ses faons
Le nain regarde d'un air triste
Grandir l'arlequin trismégiste
Ce poème d'Apollinaire fut publié dans le recueil "alcools", recueil probablement le plus célèbre du poète.
Ce poème fut dédié à Marie Laurencin si je ne m'abuse, laquelle fut, malgré ce que ses aquarelles laissent supposer, cataloguée longtemps parmi les cubistes (à vérifier).
Cette dédicace place d'emblée le poème dans un tête à tête avec la peinture, qui se confirme à travers une première lecture du poème, lequel semble nous décrire une scène qui regorge de termes liés à la peinture, plus précisément à la teinte :
"ombre", "s'exténue", "mire", "crépusculaire", "sans teinte", "constellé", "pâle", "blême".
Quatre occurences soulignent ici la pâleur de la scène décrite, et l'on est tenté de relier cette tonalité au titre du poème.
Armés de cette première piste de lecture, reprenons le poème vers à vers, autour de ce qui sera notre axe directeur : comment ce poème joue-t-il à se mesurer à l'art pictural, proposant l'ekphrasis (en gros, description de peinture en littérature) d'un ou plusieurs tableaux afin de les sublimer par le pouvoir des mots ? (naze, LOL, je pense le reprendre et l'affiner plus tard)
Le titre du poème renvoie apparemment à un moment précis de la journée, cet instant où la nuit succède au jour, où le lumière est parfois cataloguée un peu vite de blafarde, où l'on se situe dans un entre deux entre la lumière et la nuit.
Je considère, malgré la disposition du poème, les quatre premiers vers comme un quatrain, dans la mesure où la rime embrassée m'y autorise.
Ce premier quatrain présente arlequine, personnage de la commedia dell'arte, nue, face à un étang, en contemplation de son corps :
Frôlée par les ombres des morts
Sur l'herbe où le jour s'exténue
L'arlequine s'est mise nue
Et dans l'étang mire son corps
Nous reconnaissons d'emblée un paradoxe dans la scène décrite puisqu'Apollinaire nous présente un personnage que chaque spectateur devrait reconnaître d'emblée s'il la voyait monter sur scène, à son habit.
Or, ici, arlequine est nue.
Arlequine est un personnage qui n'existe pas dans la commedia dell'arte, mais colombine y est parfois représentée en amoureuse d'Arlequin, portant alors un vêtement qui se rapproche de celui, coloré, de son amant.
principales caractéristiques du personnage :
Dans certains cas, elle a été séduite par Arlequin puis abandonnée. Par chance, il lui arrive d’être protégée par une fée ou une marraine magicienne qui la fait marier à Arlequin. Comme ce dernier, elle est fondamentalement optimiste, bien que n’ayant plus d’illusion. Elle déborde d’énergie. Elle est piquante et indépendante. Elle sait utiliser les hommes pour parvenir à ses fins.
Dès les premiers vers, nous comprenons que la scène qui va se jouer se situera bien dans les marges de l'univers théâtral, dans un univers distordu, où les repères que nous avons concernant les personnages, seront bouleversés.
La scène est inquiétante, un peu étrange, puisque qu'arlequine, loin de la fête de village où son personnage se produit (peut-être après le spectacle, à l'heure où tombent les masques), est ici "frôlée par les ombres des morts". Le groupe adjectival qui décrit arlequine est placé au premier vers du poème afin bien évidemment d'être mis en évidence, et ce vers qui commence par une caresse, s'achève par l'évocation de la mort, sans plus d'explication. Cette idée de la mort est reprise à la rime, puisque le jour "s'exténue".
Le poète nous invite à une sorte de ballet dont le macabre n'est pas exclu, disons plutôt l'ambiguité, dans la mesure, où, nous le verrons, il est, à l'instar du crépuscule ardu à décrire sur le plan lumineux, difficile de définir l'ambiance créée dans ce poème.
Le poète ne donne aucune piste quant à la situation du personnage qu'il décrit, mais son attitude étrange n'est pas sans rappeler un tableau : le "Gilles" de Watteau, tableau ô combien célèbre, dont l'ambiguité dans l'attitude est souvent soulignée par les commentateurs. Dans ce tableau, Pierrot, les bras ballants, affiche une attitude génée, un brin souriante un brin mélancolique, difficile à définir et qui laisse le contemplateur face à un malaise indéterminé et une difficulté de trancher quant au sens à apporter à la scène. Bien entendu, cette scène, dans le tableau de Watteau, possède une lumière qui personnellement me rappelle celle du crépuscule :
notons enfin que cette première strophe, confirmée dans sa référence par la présence d'un Arlequin blanc comme Pierrot dans les vers suivants, rappelle un célèbre poème de Verlaine, publié en 1866, dans "poèmes Saturniens". Mais ici il semble que l'ambiance soit tout autre, car hormis la femme perverse qui mène la sarabande, Verlaine décrit une scène bien plus gaie, du moins pendant la première partie du poème :
Verlaine a écrit:COLOMBINE
Léandre le sot,
Pierrot qui d'un saut
De puce
Franchit le buisson,
Cassandre sous son
Capuce,
Arlequin aussi,
Cet aigrefin
si Fantasque
Aux costumes fous,
Ses yeux luisant sous
Son masque,
- Do, mi, sol, mi, fa,
Tout ce monde va,
Rit, chante
Et danse devant
Une belle enfant
Méchante
Dont les yeux pervers
Comme les yeux verts
Des chattes
Gardent ses appas
Et disent : «A bas
Les pattes! »
Eux ils vont toujours !
- Fatidique cours
Des astres,
Oh! dis-moi vers quels
Mornes ou cruels
Désastres
L'implacable enfant,
Preste et relevant
Ses jupes,
La rose au chapeau,
Conduit son troupeau
De dupes?
Dernière édition par le Ven 26 Mai - 23:59, édité 6 fois