PARIS (Reuters) - Nicolas Sarkozy a maintenu ses critiques envers les juges taxés de laxisme dans la lutte contre la délinquance, alors que Jacques Chirac insistait sur le respect de l'indépendance de la magistrature.
Nicolas Sarkozy, qui a parlé de "démission" des juges, n'a pas retiré sur propos qui ont provoqué une vive indignation au sein de la magistrature et dans l'opposition de gauche.
Le ministre de l'Intérieur a invoqué le soutien des Français dans ses critiques contre les juges de Bobigny, en Seine-Saint-Denis, coupables à ses yeux de ne pas envoyer assez de délinquants, notamment mineurs, en prison.
"Quel est mon juge ? Les Français ! Je persiste et je signe", a-t-il dit au micro de RTL, revendiquant le droit de critiquer les décisions de certains magistrats sans être aussitôt accusé d'avoir un comportement "anti-républicain".
"En démocratie, c'est le jugement des Français qui compte", a-t-il ajouté.
A ses yeux, critiquer les décisions judiciaires ne remet pas en cause l'indépendance de la justice, qu'il dit respecter, mais constitue un exercice normal et légitime de la part d'un ministre.
Le ministre de l'Intérieur a écrit au premier président de la Cour de cassation, Guy Canivet, pour lui exprimer ce point de vue, a-t-on appris à son ministère.
Peu après ces déclarations, Jacques Chirac a reçu à l'Elysée pendant 45 minutes, à sa demande, le premier président de la Cour de cassation, Guy Canivet, plus haut magistrat de France.
A l'issue de l'entretien, le chef de l'Etat a publié un communiqué qui ne mentionne pas le ministre de l'Intérieur, appelle à l'unité et rappelle le principe d'indépendance de la magistrature et la nécessité de lutter contre la délinquance.
"Le chef de l'Etat a rappelé sa très grande exigence quant au respect de l'indépendance des magistrats et à la nécessaire sérénité qui doit présider à l'exercice de leur mission", dit le texte. Le président demande que "toutes les énergies" soient "mobilisées" pour "prévenir et sanctionner les violences".
APPEL A "L'APAISEMENT"
Guy Canivet, qui avait stigmatisé jeudi dans un communiqué les attaques contre les juges de Bobigny, a salué "une réponse institutionnelle" appropriée de Jacques Chirac, dans un entretien avec des journalistes au palais de justice.
"Ce n'est pas un problème personnel entre le premier président de la Cour de cassation et un ministre. Mon message est un message d'apaisement, il faut que la polémique s'arrête. Pour lutter contre la délinquance, il faut que chacun soit à sa place et fasse ce qu'il a à faire", a-il dit.
Le Syndicat de la magistrature, classé à gauche, a pris acte avec satisfaction "du rappel à l'ordre républicain du président de la République".
"Compte tenu des attaques réitérées du ministre de l'Intérieur, cette réponse était indispensable. Nous espérons qu'elle préviendra toute récidive", dit-il dans un communiqué.
Pour traiter le problème particulier du département de la Seine-Saint-Denis, une réunion se tiendra dans les prochains jours à Bobigny entre la hiérarchie de la police et les hauts fonctionnaires du ministère de la Justice, ont annoncé Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy.
Dans le contexte d'une montée de la délinquance violente, notamment dans ce département, Nicolas Sarkozy estime que les juges ne recourent pas assez à la prison, notamment pour les mineurs, et entretiennent "un sentiment d'impunité".
Les syndicats de magistrats rappellent que la loi rend très difficile l'emprisonnement des mineurs. Ils contestent tout laxisme, expliquent que le nombre d'incarcérations n'est pas le seul critère d'efficacité de la justice et soulignent que les effectifs policiers sont en baisse en Seine-Saint-Denis.
L'opposition de gauche estime que le ministre de l'Intérieur cherche à faire diversion sur son bilan personnel et dénonce un "dérapage" de Nicolas Sarkozy.
Ses principaux responsables avaient demandé jeudi que le président le désavoue ou lui demande de retirer ses propos.
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